Le Horla
Monstre terrifiant, irréductible à toute catégorie humaine, le Horla,
si l'on en juge par quelques légères notations, appartient peut-être tout autant à quelque " roman familial ",
comme le fantôme d'un amour lointain; ce baiser qu'une bouche prend sur une bouche, cette rose cueillie, ce
lait bu ( détesté par le narrateur ), renvoient à un être doux, tout entier du côté de la liquidité
primordiale ( et pourquoi ce choix du nom de Parent - " Monsieur Parent " est d'ailleurs le
personnage central d'un conte de Maupassant qui porte ce titre - pour le tou-puissant médecin ? ). Dans
l'horreur gît aussi le désir fasciné de mourir, comme un retour impossible ( " comme on tomberait pour
s'y noyer dans un gouffre d'eau stagnante " ). Ce " bourreau " qui ne lâche pas sa victime et
la retient dans ses invisibles filets, ne possède-t-il pas une horrible douceur maternante ? Quoi qu'il en
soit, et si multiple qu'il soit, le Horla est bien un ogre possessif qui
va scinder l'identité de sa victime. " Je ne suis plus rien en moi, dit le malade déjà touché par l'aile
noire de la folie et de la dévoration, rien qu'un spectateur esclave et terrifié de toutes les choses que j'accomplis. "
Ce feu qui brûle la maison sans venir à bout de cet être de lait est comme la métaphore d'un
autre feu, dévorateur, terrifiant lui aussi, dont nous ne savons rien, sinon par de rares gerbes d'étincelles.
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Le Horla
Les deux versions du Horla, celle du 26 octobre
1886 et celle du 25 mai 1887, montrent son importance. Avec le remaniement, c'est la portée de l'oeuvre qui
a évolué; la seconde version accentue le caractère fantastique en modifiant le point de vue : plus de médecin,
plus d'auditeur, plus de neutralité bienveillante
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